Madagascar et ses enfants
Pour mes photographies, j’ai essayé de retransmettre une image positive, et de montrer que la beauté était omniprésente, même dans la misère la plus noire. Car c’est comme cela que j’ai ressenti les habitants de l’île. J’ai cherché, via mes photos, à leur rendre hommage à ma façon en tentant de saisir cette petite étincelle qui illumine leur regard J’ai vraiment été émue par ce peuple. Malgré leurs difficultés, les malgaches ne perdent jamais leur sourire et leur joie de vivre, et j’admire cette ténacité !
Ce voyage m’a fait (et me fait) encore beaucoup réfléchir par rapport à nos sociétés occidentales, basées sur la consommation à outrance et qui engendre une perpétuelle insatisfaction…
Madagascar est un pays magnifique, avec un peuple vraiment admirable, chaleureux, accueillant, paisible, toujours souriant malgré les difficultés de la vie quotidienne, qui sont nombreuses étant donnée la grande pauvreté du pays… Cela fait mal au cœur de voir un si beau pays, avec autant de ressources, ravagé par la corruption. Mais pourquoi Madagascar souffre t’elle d’une telle pauvreté alors que la grande île fait partie des plus nanties en matière de ressources naturelles?
D’une part, l’intégralité des ressources est exploitée par des firmes étrangères, qui, dans la majorité des cas, apportent peu à l’économie nationale car elles tirent profit d’une main-d’œuvre abondante et très attractive ainsi que de faibles redevances et impôts à l’État malgache. Et le comble, c’est que les matières premières ne sont pas transformées sur place (c’est-à-dire à Madagascar); la transformation se fait à l’extérieur pour donner naissance à des produits, qui seront ensuite revendus beaucoup plus cher aux Malagasy. Et même si les sociétés étrangères versent des redevances à l’État, cette somme d’argent est détournée par des hommes politiques sans scrupule, laissant la population dans le manque de nourriture, dans le déficit de soins ; les problèmes de corruption participent largement aux difficultés économiques du pays.
D’autre part, les conditions climatiques assez rudes ne sont pas favorables aux pays étant donné que 90 % des Malagasy vivent de l’agriculture. Les récoltes sont chaque année menacées par les inondations, la sécheresse ou les cyclones. Tous ces fléaux contribuent à l’accroissement de cette pauvreté extrême
Malgré cela, les enfants sont joyeux et dès que nous atteignons un village, ils nous accueillent, se bousculent pour nous approcher et leurs sourires reflètent la cordialité des habitants de ce petit coin de paradis. Mais, il faut être solide, car c’est un vrai choc culturel. Je crois n’avoir jamais vu autant de misère auparavant.
A peine arrivés dans les villages, les enfants se précipitent à notre rencontre, se bousculent pour être parmi les premiers à nous approcher, nous toucher, et nous saisir la main pour ne plus la lâcher jusqu’à la fin de notre visite. Au début, retentissent des “salam”, “salame”, “salamo”, (signifiant bonjour en malgache) suivis ensuite par des “vazaha cadeaux” puis ça se transforme en” vazaha bonbon”, puis ça devient des “vazaha photo” . Je suis suivie par une horde d’enfants qui ont compris que j’avais au fond de mon sac des cadeaux comme des crayons que je donne directement au maitre d’école afin qu’ils les distribue sans créer d’émeutes, mais je n’ai pas pu résister à acheter des bracelets pour les petites filles qui se parent fièrement de leurs trophées. De vieilles chaussures, des habits, des médicaments… tout leur est utile car ils n’ont vraiment rien
Certains enfants, plus timides, se réfugient dans les bras de leur mère, d’autres restent à l’écart et observent ces vazaha, que peuvent ils penser de ces inconnus qui ne parlent pas la même langue qu’eux ?
Cette petite fille, à l’écart des autres enfants et à l’abri du soleil, casse des pierres, certainement pour aider ses parents.
En effet, le concassage de pierres pour en faire des graviers est une activité économique très répandue pour les plus défavorisés et c’est parfois pour eux le seul moyen de subvenir à leurs besoins.
Casser les pierres nécessite de la force, il faut casser les plus grandes en nombreux morceaux, puis transformer ces morceaux en gravillons, ces gravillons seront ensuite vendus aux maçons qui s’en serviront pour leurs constructions. Sur le bord des routes, on voit de nombreuses femmes qui cassent les pierres et comme outil de travail, elles n’ont qu’un marteau et une grosse pierre qui sert d’appui.
Difficile de prendre en photo un seul enfant, tous veulent être photographiés, ils font les zouaves devant la caméra et ils se poussent mutuellement pour se placer devant l’objectif, ce sont alors de grands éclats de rire et de surprise lorsqu’ils découvrent leurs visages sur l’écran; certains ne sont certainement jamais vu dans un miroir.
Lionel, notre photographe accompagnateur, venant plusieurs fois par an dans ces villages, leur ramène les clichés sur papier lorsqu’il repasse et c’est pour eux un cadeau en or. Ce sera chose faite pour moi.
Madagascar et ses habitats
Dans les villages au bord du canal du Mozambique, les conditions de vie sont très basiques: les pêcheurs vézo vivent sur la plage, dans des maisons souvent construites en vondro (sorte de jonc) ou en toile de voile rapiécée
…dans les villages de pêcheurs, les rues principales commerçantes sont colorées et sont bordées de jolies maisons tout en couleur….
…alors que dans les rues avoisinantes, moins fréquentées et plus pauvres, ce sont de simples maisons (ou plutôt des cases) avec une structure en bois et un toit en feuilles de palmiers; et pour les personnes plus aisées, ce sont des maisons en dur, sans eau ni électricité, avec parfois de petits panneaux solaires tout juste bons à charger un téléphone portable.
Malgré cette vétusté, les maisons sont très propres, les femmes passent régulièrement le balai et dans les rues il y a très peu de déchets.
Dans les maisons de “riches”, très propres et très bien entretenues malgré la poussière environnante et le sable, un petit coin cuisine est aménagé; n’ayant pas d’eau courante, les femmes vont chercher l’eau au bord du fleuve ou dans un puits dans des seaux qu’elles portent sur la tête , elles utilisent de grandes bassines colorées que l’on trouve sur les marchés pour la cuisine, la vaisselle ou la lessive, et la préparation des plats se fait sur un brasier, avec du bois mort comme combustible, dans de grandes marmites en aluminium, fabriquées à Madagascar.
Le riz est la base de l'alimentation, les malgaches en mangent matin, midi et soir et les moins démunis, rajoutent de la viande de porc, du zébu, du poulet ou du poisson. Cependant, dans la Grande Ile, la malnutrition est une des premières causes de la mortalité infantile. En effet, une étude sur les conséquences de la faim menée par les Nations Unies a montré que 43% de la mortalité des enfants de 0 à 5 ans sont causés par la malnutrition. L’explication réside dans le fait que les enfants, une fois malnutris, deviennent vulnérables à toutes sortes de maladies classiques, comme la diarrhée, le paludisme…. N’ayant pas assez de forces, leurs systèmes immunitaires deviennent vulnérables et de ce fait, ne peuvent pas lutter efficacement contre les maladies qui sont facilement vaincues chez les enfants ayant une alimentation saine et équilibrée, ou une bonne nutrition. Ce qui rend donc vulnérables ces enfants, au point d’en mourir.
Dans les villes comme Tananarive , la pauvreté urbaine est encore plus flagrante et les bidonvilles, en augmentation suite à la migration des populations au sein des villes, côtoient d’anciennes maisons coloniales ainsi que des maisons aux façades colorées; le tout au milieu des embouteillages et de la pollution .
Madagascar et la vie quotidienne des malgaches
Dans les villes,
l’agitation est au rendez vous et les rues grouillent de monde, particulièrement les jours de marché très coloré et très animé
Inutile les supermarchés, la nourriture de base s'achète dans les échoppes que l'on trouve dans les rues. Il y en a partout et elles sont ouvertes tous les jours jusqu'à la tombée de la nuit. Les paysans viennent y vendre leur récolte ou leur pêche. On y trouve aussi l'essentiel: papier hygiénique, cigarette, lait concentré, boisson, gâteaux, bonbons, mais aussi des vêtements, des ustensiles de cuisine, des paréos…….
Tout s'achète à l'unité ou au gramme y compris le sucre, la farine, l'huile, la viande de zébu est délicieuse et tendre. Les morceaux les plus gras (notamment la bosse) sont les plus chers car les plus appréciés par la population.
Le marché bat son plein, au milieu des pousse-pousse tirés par les hommes courant pied nus, des femmes déambulent dans les rues avec d’énormes paniers sur la tête en évitant les carrioles chargées à bloc et tirées par des zébus .
Dans les campagnes, sur les hauts plateaux,
il y a moins d’agitation et les paysans s‘affairent dans les rizières et les champs
Alors que sur la route nous croisons des écoliers, vêtus d’uniforme, se limitant souvent à une blouse, et parcourant parfois plusieurs kilomètres pour rejoindre leur école, d’autres sont déjà dans les champs pour aider leurs parents qui n’ont pas les moyens de leur offrir une scolarité. Certains transportent de gros fagots sur leurs têtes, d’autres portent un bébé dans leurs dos pour soulager la maman qui doit travailler dans les rizières ou marcher sur des kilomètres pour se rendre au marché le plus proche afin de vendre ses récoltes. Mais, malgré ces conditions difficiles, ils semblent heureux et leurs rires résonnent tout autour de nous.
Dans les villages de pêcheurs,
la vie semble plus paisible et plus facile qu’en ville
En fin de journée, les femmes se rassemblent sur la plage pour attendre l’arrivée des pêcheurs et repartir avec leurs butins dans de grosses bassines qu’elles portent sur la tête, certaines en profitent pour vendre de la nourriture à emporter, du pain ou des beignets qu’elles ont préparés et dont les malgaches sont friands.
Dans la capitale de l’aluminium: Ambatolampy
Ambatolampy: la fonderie d’aluminium, située dans les Hautes Terres à 70 km au sud de la capitale, Ambatolampy est la principale ville à mi-chemin entre Antananarivo et Antsirabé.
Cette ville est réputée pour sa production artisanales de batteries de cuisine et autres objets en aluminium qui sont vendus dans tout le pays. Ces petites fabriques, qui seraient au nombre d'une centaine dans la localité, sont toutes familiales. Elles occupent les membres de la famille et, pour le surplus, des ouvriers venant de communes rurales aux alentours. Le savoir-faire se transmet de génération à génération.
Ils utilisent comme matière première des morceaux d'aluminium de toutes sortes provenant de récupérations les plus diverses (culasse, jantes, tringles…) Ces morceaux sont d’abord casser en petits morceaux à l’aide d’une masse, puis fondus, puis le métal liquide, bouillant, est ensuite versé dans le moule. Le métal bouillant est manipulé certes avec précaution, mais sans protection particulière, pieds et mains nus, en risquant à tout instant des brulures graves et en respirant à longueur de journée des vapeurs d’aluminium. Le travail est fait rapidement avec beaucoup de dextérité. Un ouvrier peut produire plusieurs dizaines de casseroles par jour, souvent une cinquantaine et plus.
On raconte que cet artisanat aurait commencé avec la chute d'un avion durant la seconde guerre mondiale dans la région. On retrouve ses cocottes en vente sur les marchés et tout le monde les utilise pour la cuisson alimentaire en raison de sa légèreté et sa bonne capacité à diffuser la chaleur.
Mais on sait depuis longtemps que l'aluminium est un matériau très toxique, compte tenu de sa capacité à migrer dans l'eau de cuisson des aliments!!
A Tananarive, tous les dimanches à la messe de Père Pédro
Tous les dimanches, la messe est une fête sans précédent, cet immense gymnase qui sert d’église, rassemble 5 à 7000 personnes autour du Père Pédro. Cette messe du dimanche est un véritable miracle car un lieu d’exclusion, de douleur, de souffrance devient un lieu de rassemblement et de joie. Ce prêtre argentin, missionnaire a Madagascar depuis 1970, a été confronté en 1989 à la misère et aux conditions de vie inhumaine des enfants, en découvrant avec horreur des enfants, pieds nus, arpenter, au milieu des pauvres et des animaux, des montagnes de détritus à la recherche d’un bout de tissu, de piles usagées, de ferraille, ou tout autre objet susceptible d'être revendu dans la rue. Il décida alors de créer l’association "Akamosa “les bons amis” en malgache et de transformer cette décharge en oasis d’espérance et de les sortir de cet enfer.
La liesse est de rigueur, une messe qui dure 3h pourrait en effrayer plus d’un, mais nous, on n’a pas vu le temps passé et on a été très touché par ces milliers de malgaches qui prennent le temps de chanter, de prier, de se regarder
La devise du Père Pédro: un toit, un travail, une éducation pour retrouver sa dignité car à Akamosa, on n’assiste pas, on aide: les adultes doivent apprendre un métier pour travailler et les enfants doivent aller à l’école , c’est la condition pour faire partie d’ Akamosa et de pouvoir loger dans une des petites maisons construites par les habitants.
A ce jour, les «bons amis» forment désormais une véritable ville ou plutôt une réunion de 18 villages, qui rassemblent 20 000 pauvres, avec des stades, des écoles et des dispensaires, c’est une véritable société où chacun devient une personne respectée et apprend à être responsable de son avenir.
Et au hasard des rencontres, dans les rues et sur les pistes
Vous l’aurez compris, j’ai adoré Madagascar, ses habitants, ses paysages et un tel voyage ne vous laisse indifférent face à une telle misère
Si les pays riches sont un peu moins riches, les pays pauvres eux, deviennent de plus en plus pauvres et plus que jamais, la solidarité doit être une priorité, une urgence. Madagascar a besoin d’une aide à l’éducation et à la scolarisation des enfants, d’une aide alimentaire, d’une aide pour accéder à des terres cultivables, d’une aide médicale et sanitaire…. Les besoins sont énormes et chacun peut participer à son niveau .
Et le Blog de Philippe et ses vues aériennes et ses vidéos ….. envolez-vous
“Le bien que tu fais restera ton trésor” proverbe malgache